Aussitôt que Mahomet se fut assuré ses asiles, ses fidèles et ses alliés, lesprit de prosélytisme sembla se changer en lui en esprit de conquête. Le guerrier remplaça le prophète. La vengeance lui fit prendre les armes contre ses persécuteurs. Il enrôla quelques centaines dhommes intrépides et marcha avec eux vers la Mecque. Cent hommes dans ces déserts étaient alors une armée, et la moindre rencontre prenait le nom de bataille. Il conclut, dans ses excursions armées dans le désert, des alliances nouvelles avec les tribus errantes et enrôla leurs plus vaillants guerriers dans ses troupes. Tous ses succès, pendant la première année, se bornèrent à la surprise et au pillage dune caravane de la Mecque chargée de raisins secs et de cuirs. Celui de ses lieutenants qui avaient remporté cette victoire pendant les jours saints fut blâmé par lui davoir versé le sang en temps prohibé. «Cependant, dit-il en sadoucissant et en partageant les dépouilles entre les croyants, lidolâtrie est pire que le meurtre ! » Il établit à cette occasion, lusage qui subsiste encore aujourdhui dappeler les fidèles à la prière par un signal qui confondit les voeux du peuple, aux mêmes heures, dans une même inspiration. On lui proposa dabord les sons de la trompette qui appelait les juifs dans leur temple, puis la crécelle qui convoquait les chrétiens avant linvention de la cloche; il préféra, après de longues hésitations, la voix humaine, ce signal vivant, cet appel de lâme à lâme, qui donne aux sous laccent de lintelligence et de la piété. Il institua des muezzins, serviteurs de la mosquée, choisis à létendue et à la sonorité de leurs voix, pour monter aux sommets des minarets et pour chanter den haut sur la ville ou sur la campagne lheure de la prière. Il donna, pour la première fois, cette fonction à tin affranchi dAboubekre, son compagnon de fuite, à cause de la mélodie de sa voix. Il lui dicta lantienne inaltérable de cette convocation, répétée depuis par tant de milliers de bouches sur tous les minarets de lAfrique, de lEurope et de lAsie: « Dieu est grand ! Jatteste quil ny a quun Dieu Mahomet est lapôtre de Dieu ! Venez à la prière ! Venez au salut « Dieu est grand ! Dieu est unique ! Venez à la prière Venez à la prière ! » Il fixa, en même temps, le minimum daumône que chaque musulman serait tenu, devant Dieu, de donner aux pauvres pour racheter son droit de propriété et de privilège sur ses frères indigents. Cet impôt du ciel fut évalué par le législateur au dixième des choses possédées- . Il corrigea ainsi, par une prescription de charité, cette âpreté du gain, vice égoïste des Arabes, et nivela sans cesse et volontairement les inégalités de fortune par le perpétuel écoulement des aumônes. Ce fut le jubilé des juifs, qui remettait les dettes tous les sept ans, appliqué sous une autre forme aux musulmans. Cette loi, religieusement observée dans tout lislamisme, sévit constamment à y éteindre à la fois le scandale des richesses trop accumulées et le scandale des indigences trop criantes. Elle propagea aussi lesprit de famille et les devoirs de fraternité dans tout le peuple.
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