Cependant Aiché, la fille dAboubekre, parvenue à la fleur de son adolescence, et douée de tous les charmes de lesprit et des grâces du corps les plus estimées des Arabes :lélégance de la taille, la souplesse des attitudes, la majesté de la démarche, labandon de la chevelure noire, léclat humide des yeux comme létoile dans le puits, disaient leurs poètes, était son épouse préférée. Elle régnait dans sa maison à titre de tille autant que dépouse. Elle régnait sur son cour par létendue et par la justesse dun génie naturel qui sétait façonné dès lenfance par le génie et sur léloquence du prophète. Elle était son conseil autant que son amour; il trouvait en elle à la fois tout ce quun père pouvait rechercher dans sa fille, un mari dans sa femme, un inspiré dans son disciple. Les récits, les confidences, les mémoires dAiche elle-même, transmis par sa bouche après la mort de Mahomet à lhistoire, attestent en effet dans lesprit et dans le cour dAïché tout ce qui pouvait rendre une femme digne de captiver le plus grand des hommes de son temps. Aucune favorite des souverains modernes de lOrient ou de lOccident, si ce nest la célèbre Roxane, ne paraît avoir justifié, par plus de charmes et par plus de séductions, son empire sur celui dont elle était lesclave. Un nuage troubla cependant quelques jours cette félicité, et jeta le doute et la tristesse dans lâme de Mahomet sur la fidélité de sa favorite. Voici le récit des circonstances les plus secrètes de cette aventure, par la bouche même dAiche.
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