Mahomet, après la retraite des Coraïtes , redescendit dans la plaine pour pleurer et ensevelir les morts. En approchant du cadavre de son oncle Hamza, mutilé par Hind, la fureur le saisit. «Si je ne craignais pas, dit-il daffliger Safyà, sa mère, je le laisserais là, en témoignage de limpiété des idolâtres, jusquà ce que les entrailles des aigles fussent devenues son sépulcre; si Dieu maccorde un jour la victoire sur les Coraïtes «ou Coréischites»,jen mutilerai trente pour venger Hamza! » Il ne tarda pas à se repentir de ce mouvement tout humain de férocité et de vengeance. «Mais non, dit-il en se reprenant, sil est permis aux musulmans de traiter leurs ennemis comme on les a traités eux-mêmes, il est plus méritoire de supporter sans représailles et avec magnanimité de tels outrages sans les imiter » Il défendit de profaner les morts. Il enveloppa de son manteau le corps dHamza, et fit lui- même ses funérailles. «Ô Hamza ! sécria-t-il sur sa tombe, je nai jamais perdu un ami tel que toi » Les femmes de Médine, accourues pour pleurer leurs pères, leurs époux, leurs fils, voulaient emporter leurs corps pour les ensevelir à Médine «Non, dit-il, enterrez les morts où ils sont tombés, et sans laver le sang de leurs blessures. Ils paraîtront avec ce sang au jour de la résurrection, et leurs blessures exhaleront lodeur des aromates ! Je porterai alors moi-même témoignage pour eux ! » Une de ces femmes rencontra larmée vaincue qui rentrait à Médine : «Où est mon père ? demanda-t-elle aux soldats. - Il est tué, lui répondit-on. - Et mon mari ? - Tué aussi. - Et mon fils ? - Tué avec eux, lui dirent-ils, - Mais Mahomet ? - Le voici vivant, lui répondirent les guerriers. - Eh bien, dit- elle en apostrophant le prophète, puisque tu vis encore, tous nos malheurs ne sont rien »
Un tel fanatisme promettait Mahomet des représailles de sa défaite. Il parut sentir plus de tristesse que dhumiliation dans son revers. En passant devant une des maisons à Médine doù lon entendait sortir des lamentations des femmes déplorant la mort de leurs époux, «Et le brave Hamza, dit-i! en versant lui-même des larmes, il nest point de femme qui le pleure ! »
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