Lesprit de Mahomet sembla lui survivre sur la terre et éteindre après lui les rivalités qui devaient saper son oeuvre en divisant les compétiteurs à sa succession. Son âme les gouverna encore quelque temps après lui. La foi, le zèle, labnégation de toute prééminence personnelle étouffèrent lambition des imams. Ils immolèrent pieusement ce quil y avait dhumain dans leur cour à ce qui était vérité dans la mission du prophète labolition de lidolâtrie, ladoration du Dieu unique. A peine Aboubekre avait-il été nommé khalife, cest-à-dire vicaire ou successeur du prophète de Dieu (kalfet resoul Allah) quil ordonna aux combattants arabes de Médine, rassemblés pour une expédition en Syrie, de marcher pour exécuter lordre posthume du prophète. Omar, qui avait été désigné par Mahomet pour marcher avec cette expédition, hésitait à obéir, dans la crainte que labsence de Médine des meilleurs soldats de lIslam pendant lagitation causée en Arabic par la disparition du prophète ne compromît la ville, la religion et le gouvernement du khalife. Il représenta fortement ce danger à Aboubekre. Mais le khalife, indigné, le prenant par la barbe et lui reprochant son peu de foi dans les promesses du Révélateur «Non, dit-il, dût Médine succomber sous linvasion des animaux féroces, je ne révoquerai pas un ordre donné par le prophète. II faut que sa volonté saccomplisse après sa mort comme elle sexécutait pendant sa vie. » Larmée partit sous les ordres du jeune Ouçama, nommé commandant de lexpédition par Mahomet, malgré son inexpérience. Aboubekre accompagna les troupes jusquà leur première halte, à cheval, à côté du jeune général, pour lui assurer le respect de larmée. Au moment où il le quittait pour retourner à Médine «Je désirerais, lui dit-il avec déférence respectueuse, garder avec moi Omar pour me conseiller dans les périls ou Médine va se trouver pendant labsence de ses meilleurs guerriers. Considère si tu peux me laisser Omar sans péril pour toi. » Ouçama sempressa de dispenser Omar de faire la campagne. Aboubekre, alors, faisant ranger larmée en cercle autour de lui « Guerriers de lislam, dit-il, arrêtez-vous un instant et écoutez bien les préceptes que je vais vous promulguer pour les temps de guerre ! Combattez avec bravoure et loyauté ! Nusez jamais de ruse et de perfidie envers vos ennemis ; ne mutilez pas les vaincus; ne tuez ni les vieillards, ni les enfants, ni les femmes ; ne détruisez pas les palmiers, ne brûlez pas les moissons , ne coupez pas les arbres fruitiers, négorgez pas les animaux, si ce nest ce qui sera nécessaire à votre nourriture. Vous trouverez sur votre route des hommes vivant dans la solitude et dans la méditation à ladoration de Dieu, ne leur faites aucun mal ni aucune injure !» Il nexcepta de cette inviolabilité des faibles et des ermites chrétiens par la guerre que ceux qui fanatisaient les populations con la doctrine de lunité de Dieu. Cet ordre du jour du chef réputé barbare dune horde de Bédouins du désert contraste encore aujourdhui par sa tolérance et son humanité avec les manifestes de guerre des généraux dune religion plus fraternelle et dune civilisation plus avancée.
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