Cependant, ainsi quOmar lavait prévu, le bruit de la mort de Mahomet, que la superstition populaire croyait doué de limmortalité sur la terre, fit jeter un premier cri dincrédulité aux Arabes. «Sil eût été véritablement prophète, comment serait-il mort ?» disaient-ils. Et un grand nombre abjura sa foi. La Mecque se souleva contre le gouverneur de Mahomet, nommé Attab. «Mahomet est mort, dit Attab aux révoltés, mais sa foi subsiste et son empire va sétendre, et il vous exterminera. » Les tribus du désert flottèrent dans lincertitude et dans lanarchie ; de faux prophètes les parcoururent pour hériter de la vénération et de lautorité de Mahomet. Il se forma pendant quelques semaines autant de partis que de tribus. Ces rebelles cernèrent Médine et envoyèrent des députés dans la ville pour déclarer quelles ne payeraient plus de tribut. Oniar et les politiques de Médine, appelés en conseil par Aboubekre, conseillèrent de temporiser et de transiger en attendant le retour de larmée qui rétablirait lautorité du khalife. « Non, non, sécria de nouveau linflexible Aboubekre, la loi nous défend de pactiser avec ceux qui labjurent et de douter du secours de Dieu dans les combats quon livre pour lui ; dussé- je combattre seul ces nuées de rebelles, je ferai comme le prophète, qui na jamais compté ses ennemis. » Les politiques, confondus par le fanatisme, rougirent de leur faiblesse et congédièrent le négociateur de transactions. «Abouhekre, sécria Omar, a plus de foi à lui seul que nous tous ensemble. » On combattit. Aboubekre, vainqueur, refoula ces révoltés dans le désert et les fit poursuivre par ses cavaliers. Les fugitifs inventèrent une ruse qui les préserva des sabres des musulmans. Ils gonflèrent de vent des outres de cuir et les laissèrent traîner derrière eux retenus par de longues cordes. Laspect insolite et les bonds retentissants de ces ballons faisaient cabrer les chevaux et effrayaient les chameaux de larmée dAboubekre. Les animaux, épouvantés, emportèrent les cavaliers et les chameliers vers Médine. Mais plusieurs autres victoires remportées par Aboubekre rétablirent le prestige du khalife. Larmée dOuçama, triomphante aussi, rentra à Médine, doubla ses forces et soumit tout autour de lui dans le Nedjed. Mais, pendant quil triomphait ainsi dans le fond de lArabie, une femme arabe de la Mésopotamie, nommée Théjiah, se déclarait saisie de lesprit prophétique, et, soumettant les Arabes de la Syrie à ses inspirations, marchait à la tête dune armée fanatisée par son éloquence et par sa beauté contre lYémen. Mosseïlamah, qui sétait aussi érigé en prophète, tremblant de voir sa province submergée par cette invasion, senferma dans la ville dHedjer. Il envoya de là des présents à la prophétesse et lui demanda une conférence pour traiter de la paix. On dressa pour cette entrevue une tente magnifique entre la ville et le camp. Le général rebelle et la jeune guerrière sy entretinrent sans témoins pendant une partie du jour. Un mariage scella la paix. Théjiah adopta la foi de son mari et ramena en Syrie ses troupes chargées de dépouilles. Son mariage avec Mosseïlamah naltéra ni le prestige ni lobéissance dont cette sibylle du désert avait su sentoure». Elle vécut et mourut en paix dans les tribus quelle avait menées à la gloire.
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