La Vie de Mahomet

(Alphonse de Lamartine, 1854)

Livre 2 - Chapitre 4

Aboubekre le renvoya avec des renforts subjuguer les restes de la rébellion. Dans une de ces batailles, Leïla devenue, comme on l’a vu, femme de Khaled, sauva un prisonnier du glaive de son mari, en lui donnant l’hospitalité sous sa tente. Le lendemain, le camp de Khaled fut forcé par un groupe de cavaliers ennemis. Les cavaliers entrèrent le sabre nu à la main dans la tente de Khaled, et allaient frapper Leïla, quand le prisonnier qu’elle avait protégé la protégea à son tour. Khaled, vainqueur à la fin du jour, laissa dix mille cadavres de ses ennemis dans la poussière.

Le nègre Wahchi, converti à l’islamisme, y perça de son javelot embardé de fer le général ennemi. « Voilà, disait l’Ethiopien en montrant son javelot, l’arme avec laquelle j’ai tué le meilleur et le pire des hommes. » Il faisait allusion, par ces paroles, au meurtre d’Hamza, l’oncle vénéré de Mahomet, qu’il avait frappé sur le mont Ohud, à l’instigation des femmes, à l’époque où il adorait encore les faux dieux. Khaled entra en triomphe dans Hedjer, capitale des révoltés, pardonna aux habitants, et épousa la fille de Modjaa, chef de la tribu de Hanifà. «N’as-tu pas honte, lui écrivit Aboubekre de chercher des voluptés dans un nouveau mariage quand le sang de tant de musulmans morts pour ta victoire fume encore autour de la tente ? ». Parmi ces morts, on pleurait plus de six cents habitants de Médine, et parmi eux un grand nombre de disciples de Mahomet, dont la mémoire était jusque-là la seule édition avec commentaire du Coran. Aboubekre craignit que les préceptes et les entretiens du prophète ne périssent avec les souvenirs des survivants qui avaient entendu l’interprétation de la bouche du prophète. Il fit recueillir tous les fragments de ce livre, écrits les uns sur des feuilles de palmier, les autres sur des peaux de mouton ou de gazelle, quelques autres qui n’avaient jamais été écrits1. Il institua une sorte de concile de rédaction et de coordination du Coran, concile composé des auditeurs les plus assidus et les plus vénérés des prédications de Mahomet. Il les chargea de rédiger un exemplaire complet et type du Coran qui servirait de modèle à toutes les autres copies du livre. Il confia cet exemplaire unique à la fille d’Omar, Hafsa, une des veuves du prophète .
Livre 1:
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Livre 2:
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