La Vie de Mahomet

(Alphonse de Lamartine, 1854)

Livre 2 - Chapitre 13

Omar, dirigeant de Médine la double campagne qu’il menait de front contre les Romains et contre la Perse, ordonna à l’armé de Syrie de se joindre à l’armée de l’Euphrate pour livrer une bataille décisive aux Persans près de Cadésiah. Cette bataille dura trois jours. Les éléphants, citadelles mouvantes des Persans, étonnèrent d’abord les Arabes ; mais le troisième jour les soldats du désert s’aguerrirent contre ces animaux bardés de fer, les frappèrent au ventre, aux yeux, à la trombe, et les firent retourner sanglants et furieux contre les Persans. L’élite de la Perse périt dans cette bataille, et dépeupla l’empire des guerriers. Les dépouilles furent dignes de l’opulence et de la renommée de la Perse. Après le prélèvement de trésors immenses pour la part du trésor public de Médine, chaque cavalier reçut six mille dirhems et chaque fantassin deux mille. Le lieutenant d’Omar qui remporta cette victoire décisive s’appelait Said Said demanda à Ornar ce qu’il fallait faire de ce qui reste des dépouilles après cette distribution. «Donnez-en une part supplémentaire, répondit le khalife, à tous ceux qui pourront réciter de mémoire les plus longs passages du Coran. Ainr, un de ses lieutenants, quoiqu’il fût poète, n’en put réciter que la première ligne Au nom de Dieu clément et miséricordieux ». On rit de son ignorance. Amr s’indigna de ces railleries. «Nous autres enfants de tentes de Zobayd, dit-il en vers improvisés devant Said, si nous sommes tués dans le combat, on ne nous pleure pas. On nous admet à l’égalité de partage quand il y a des blessures et la mort à recevoir ; niais quand ce sont des dinars d’or, l’égalité cesse, et on nous demande si nous savons réciter le Coran. » Omar, informé de ces plaintes d’Amr, lui fit faire justice. Amr, ancien compagnon et rival d’Antar, l’Achille et l’honneur des Arabes, avait vécu plus d’un siècle à l’époque de la guerre de Perse. Il combattit plusieurs années encore, et ne déposa les armes qu’avec la vie. La capitale de la Perse, Madaïn, les deux villes, parce que l’on comprenait sous ce nom Ctésiphon et Séleucie, fut prise et détruite, et l’on vit bientôt s’élever les nouvelles villes de Koufah et de Bassora ; tout céda à l’ascendant des musulmans, après la bataille de Néhavend, ou victoire des victoires, les Persans reconnurent le prophète, ou se soumirent au tribut.
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